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Le Vieux

Il faisait des années supplémentaires sur terre...

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Qui dans ce paisible village de campagne ne connaissait pas le Vieux, même de loin ? Tout le monde l'appelait "Le vieux" bien que son nom soit su de tous, car personne ne connaissait vraiment son âge. Il avait bien cent ans, autant, mais nul n'en était sûr. Théodore Savinien dit le vieux faisait figure emblématique à Gargilesse. Il constituait, pour ainsi dire, une véritable institution. 

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Toujours coiffé d'un éternel chapeau, souvent un vieux chapeau de cow-boy en cuir noir, mais parfois un trilby ou même de temps en temps un simple bob, Théodore avait les traits incontestablement marqués par l'âge. Et néanmoins il n'y avait pas sur son front, sous une chevelure blanchie par les ans, d'idées ridées. Et son regard clair trahissait une âme tendre qui disait à son corps usé "encore".Les cheveux toujours assez courts, il lui arrivait toutefois de se laisser pousser une longue barbe immaculée bien qu'il la rasât la plupart du temps.

 

C'était un philosophe de village sans âge, qui adorait toujours serrer des mains d'humains bien qu'il en connût la fourberie. Il vieillissait avec une telle envie de vivre, jamais il ne s'arrêtait. L'on supposait au village que c'était à cause des guerres dans les quelles il avait combattu étant plus jeune. A cause des horreurs dont il avait été témoin. Et il était vrai que parfois, il passait de longues heures attablé avec une bouteille de vin ou d'autre alcool, le regard vide. Il était pourtant du genre sociable, le vieux, toujours prêt à partager sa boisson. Et il avait trinqué plus souvent qu'à son tour, avec des moins ivrognes pour la plupart déjà morts. 

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A côté de ça, personne ne savait grand chose sur sa vie qu'il gardait secrète. Personne ne l'avait connu marié ni ne savait ce qu'il advenait de lui lorsque brusquement il décidait de partir en voyage. Une seule certitude : il revenait toujours. 

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Il habitait une petite maison en bas du village, dont il avait transformé le rez-de-chaussée en bar. Oh, un établissement modeste et sans prétention, mais qu'il aimait beaucoup. Cela, voyez-vous, lui permettait de passer du temps en compagnie. 

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Un homme discret, en fin de compte, presque un fantôme, une ombre. Mais il y a des ombres qui font la lumière sur terre me direz-vous...

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Monsieur Savinien ? Oh, je l'ai toujours connu ici vous savez, de puis que je suis toute petite. 

 La bibliothécaire

Ah, Théodore... Il a servi dans le même régiment que moi pendant la guerre. Un brave homme ça...

Ancien combattant et voisin

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